En supervision de coach, comme en séance de coaching, la position méta est un outil indispensable et puissant, que superviseur et supervisé doivent apprendre à manier.

Dans une relation coach-client, le coaché ne sait pas nécessairement ce qu’est une position Méta, c’est donc le coach seul qui utilise cette capacité pour susciter les prises de conscience et donner de la profondeur à son coaching.

En revanche, en supervision de coach, et par fidélité au principe de parité totale entre superviseur et supervisé, la capacité Méta est partagée et utilisée à la fois par le superviseur et le coach supervisé. Ainsi, en supervision collective, chaque coach participant peut s’exercer, tour à tour, à cette capacité Méta.

Savoir observer le Méta, et ensuite, savoir partager son observation Méta, quand on participe à un groupe de supervision collective de coach, s’apprend et se cultive. Voyons dans cet article quelques éléments pour faciliter cet apprentissage.

 

QUE SIGNIFIE ÊTRE EN POSITION META ?

En coaching, « la position Méta » (du grec « meta » qui signifie au-delà de) consiste à percevoir à la fois la personne coachée, mais aussi sa propre personne en train de coacher », selon François Délivré.

Dans la pratique de la supervision de coach, la position Méta consiste à savoir observer en simultané tous les individus présents pendant la supervision, leur manière d’être en relation les uns avec les autres et sa propre manière de penser ou de ressentir les faits que l’on détecte.

Un peu à l’image du pilote d’un drone qui, les pieds sur terre, est connecté à ce qu’il voit, pense et ressent en lui-même. Et en même temps, qui a un œil sur l’écran de sa machine qui lui renvoie les images d’une vue d’ensemble, plus globale et plus systémique. Il s’agit d’être à la fois en hauteur là-haut et en présence ici. A la fois connecté à soi et aux autres. 

Si j’adapte le célèbre principe « du petit vélo de Cunji » (*) à la spécificité de la supervision de coach, le principe peut être représenté par le dessin suivant.

COMMENT DÉVELOPPER SA POSTURE META EN SUPERVISION COLLECTIVE DE COACH ?

QUE DOIT OBSERVER LE COACH EN POSTURE META PRÉCISÉMENT ?

L’observation Méta consiste à porter son attention sur le triptyque du moi, des autres et des relations qui se jouent. Ainsi, le coach, membre du groupe de supervision collective qui aura choisi de se mettre en posture de Méta, va porter son attention sur le système dans son ensemble en observant : 

  • Lui-même : Il va observer ses propres émotions, sentiments, pensées ou sensations physiques. Par exemple, un ressenti personnel de malaise, une envie de protéger une personne ou au contraire un agacement vis-à-vis d’une attitude, un sentiment d’oppression… 

 

  • Chaque participant du groupe : Il va également observer chez les autres coachs supervisés, ainsi que le superviseur du groupe, un manque d’attention, un mouvement de recul, un signe d’agacement, des yeux qui se lèvent au ciel, une parole maladroite, un ton de voix inhabituel…

 

  • Les relations et fonctionnement entretenus entre tous les membres du groupe de supervision : entre le coach supervisé (qui amène un cas) et le superviseur, entre le superviseur et le groupe de coachs supervisés, entre chaque participant, entre le coach supervisé et les autres coachs qui participent au groupe de supervision. Le coach supervisé chargé de la posture Méta pourra par exemple observer les petites oppositions ou remarques du type « interruption, changement de sujets, une question ignorée, une règle non respectée », un groupe généralement calme qui devient bruyant, deux participants qui se liguent ensemble contre une personne du groupe, les personnes qui arrivent en retard, des tentatives de vouloir convaincre, trop de convivialité (chacun se renvoie la balle du « tu es formidable »), trop de docilité à accepter les remarques ou au contraire trop de résistance et d’objection aux hypothèses amenées…

Il s’agit en fait de porter attention à la fois sur le contenu et le processus pour identifier d’éventuels points de rupture dans le système et les sous systèmes que forment les membres du groupe de supervision.

 

EN QUOI LA POSTURE META EST-ELLE UTILE EN SUPERVISION DE COACH ? 

La posture Méta est particulièrement utile en supervision de coach, car elle permet d’identifier les anomalies de fonctionnement et les reflets systémiques (ou processus parallèles), et ainsi, faciliter les changements de niveau 2.

L’idée du reflet systémique est que « ce qui se passe ici pendant la supervision, reflète ce qui se passe là-bas, pendant le coaching, et que ce qui se passe pendant le coaching dit quelque chose de ce qui se passe dans le système du client ».

Autrement dit, l’hypothèse est que « ce qui se passe dans la réalité entre le coach supervisé et son client, se passe pendant la supervision collective » et que « ce qui se passe pendant la supervision collective se passera ultérieurement dans la relation entre le coach supervisé et son client ».

Le processus parallèle peut être révélé en répondant à une question du type : « Est-ce que ce qui vient de se passer ici dans ce groupe de supervision te rappelle quelque chose de ce qui se passe avec ton client coaché ? »

Les observations Méta sont faites pour transformer et donc bousculer les forces de préservation qui empêchent les changements pérennes et définitifs (ceux de niveau 2). Le Méta est un révélateur de conscience qui peut accélérer le changement et faire basculer le coach supervisé vers de nouvelles habitudes et une nouvelle posture de coach plus efficace.

Le Méta a pour but de servir l’intérêt de la demande exprimée par le coach supervisé et/ou celui du groupe. À contrario, le Méta n’a pas pour finalité de corriger un dysfonctionnement observé dans le groupe de supervision.

Par exemple, partager que le groupe, qui est d’habitude dans le consensus, a aujourd’hui beaucoup confronté les avis des uns et des autres, peut renseigner le coach supervisé sur son besoin de confronter davantage son client. Au contraire, l’observation Méta n’a pas comme objectif d’empêcher le groupe de confronter ses idées et de revenir à une attitude consensuelle.

Le Méta va simplement utiliser en reflet de miroir le fonctionnement mis en œuvre par le groupe, comme une hypothèse de similitude possible avec ce qui se passe dans la relation entre le coach supervisé et son client qu’il accompagne en coaching.

 C’est une chose d’observer en Méta ce qui se passe, cela en est une autre de savoir partager ses observations Méta !

 

COMMENT PARTAGER UNE OBSERVATION META LORS D’UNE SUPERVISION DE COACH ?

Le partage de l’observation Méta se fait à un moment volontairement choisi et dans le respect de certains critères.

Le moment idéal pour partager son observation Méta est celui où les forces de préservation qui empêchent le coach supervisé d’avancer dans sa demande, semblent être à leur apogée.

En effet, le retour Méta risque d’apporter de la confusion complémentaire sans permettre le changement espéré, tant que le coach supervisé semble encore être dans le flou, voire le déni.

La condition pour le faire est aussi de s’assurer que l’observation Méta est bien en lien avec la demande du coach supervisé.

Des cas concrets d’observation Méta

Par exemple, Elisabeth exprime une difficulté contractuelle et relationnelle avec un client. Sa demande de supervision est de comprendre ce qu’elle aurait pu faire différemment pour que cela ne se produise pas. Vous avez observé que, contrairement aux habitudes du groupe de supervision et du superviseur, rien n’a été convenu sur les règles pour traiter ce cas (méthode et minutage notamment). Vous avez également observé que, malgré les questions du groupe qui semblent éclairer le manque de clarté autour du contrat posé avec le client, le coach supervisé affirme que là n’est pas le sujet. Après un certain nombre d’interventions du groupe, vous sentez qu’Elisabeth est moins hostile à l’hypothèse d’un cadre mal posé avec son client. C’est le moment où le partage de votre observation Méta peut produire un reflet de miroir éclairant pour aider Elisabeth à répondre à sa demande de supervision.

Quand le moment est propice, c’est avec tact qu’il s’agit de partager ses observations Méta car le risque d’interprétation est immense quand, en tant que coach supervisé, on prend le rôle du Méta.

L’observation Méta doit par conséquent être factuelle, privilégier le « nous » afin que le coach en posture Méta s’inclue dans l’observation, éviter de pointer un comportement ou des mots exprimés, mais restituer l’élément observé sous forme de question pour interroger le système. 

Par exemple, au lieu de dire « le groupe a changé de thématique et à ignorer la demande de Pierre, je suis surpris par cela… », le Méta pourrait dire “J’ai une observation Méta à faire svp, la thématique de l’empathie a été traitée, tandis que celle de la confrontation exprimée en début de demande ne l’a pas été, je me demande ce qui peut expliquer cela ?”.

Par exemple, au lieu de dire « quand Jean exprime un peu durement son désaccord avec Andy, j’ai l’impression que personne n’est surpris, je propose de communiquer avec plus de bienveillance les uns envers les autres », le Méta pourrait dire « J’observe qu’il y a eu 5 minutes d’échange autour du désaccord entre Jean et Andy et que personne n’a réagit? J’ai ressenti un peu de gêne vis-à-vis de la situation. Je me demande pourquoi le groupe n’est pas intervenu ? »

Par exemple, on pourrait partager une observation Méta ainsi : Je souhaite partager une observation Méta si je peux attirer votre attention. « Au moment où le sujet de xx a été abordé, j’ai ressenti un profond soulagement et une impression d’ouverture dans mon plexus solaire, je propose que chacun exprime son ressenti personnel qu’il a éprouvé à ce moment précis ? »

EN CONCLUSION

La posture Méta est un outil précieux et puissant que nous utilisons en supervision collective pour faciliter le changement. À tour de rôle, chaque coach supervisé du groupe qui le souhaite, prend cette posture.

Apprendre à travailler sa posture Méta en supervision collective permet d’être à l’aise avec cette technique et de l’utiliser en séance de coaching avec ses clients. Le coach pourra ainsi détecter dans son système formé par le client et lui-même les éléments qui reflètent et informent de ce qui se passe dans le système du client. (qui pourraient être à l’origine de sa problématique)

Il convient de repérer ce qui se passe : 

– En moi (émotions, sentiments, pensées ou sensations physiques)

– Chez chacun des participants (non verbal, verbal, paraverbal)

– Dans la relation entre tous les participants (mode d’interaction, fonctionnement)

En vue de : 

– Identifier un éventuel reflet systémique ou une anomalie de fonctionnement.

 Attention : l’observation Méta est profondément transformatrice, elle peut déstabiliser le groupe et créer un désordre potentiel. C’est souvent dans le chaos que les changements de type 2 interviennent !

 Quand faire mon observation Méta ?

– Quand je sens qu’il y a moins de résistance et que le supervisé demandeur est prêt pour un changement de niveau 2

Quand il y a un lien avec la demande du coach supervisé

– Quand elle est au service du groupe et/ou du coach supervisé qui a apporté un cas

Comment faire mon observation Méta ?

– Je commence par « Je souhaite partager une observation Méta… »

– Je m’inclus dans l’observation Méta en utilisant le “nous”

– Je n’évoque que des faits

– Je ne cite pas un comportement ou des mots exprimés, mais je restitue l’élément observé sous forme de question, de prescription, de métacommunication, pour interroger le système

– Je peux utiliser la méthode : J’observe que (+ un fait), je ressens que (émotion personnelle) et je propose que nous… (Ex : que nous exprimions nos ressentis personnels, que nous émettions une hypothèse sur la raison de…)

Le reflet systémique en supervision (ou processus parallèle en psychanalyse) signifie que « ce qui se passe ici pendant la supervision reflète ce qui se passe là-bas, pendant le coaching, et que ce qui se passe pendant le coaching dit quelque chose de ce qui se passe dans le système du client »

 

Définitions :

-Le reflet systémique ascendant : « le groupe de supervision fonctionne comme le coach supervisé et son client fonctionnent pendant leur séance de coaching. »

-Le reflet systémique descendant : « Le coach supervisé fonctionnera dans sa séance de coaching avec son client, comme le groupe de supervision a fonctionné. »

-Le changement de niveau 2 de Palo Alto signifie que le système dans son ensemble a été modifié, de telle sorte que la situation est irréversible. Il va plus loin que le changement de niveau 1 qui consiste, quant à lui, à ne modifier que certains facteurs du système de façon à ce que ce dernier reste relativement stable.

 Sources:

-Les outils de la supervision, Interéditions Florence Lamy et Michel Moral

-(*) Charly Cunji (Médecin psychiatre spécialiste des TCC).

COMMENT DÉVELOPPER SA POSTURE META EN SUPERVISION COLLECTIVE DE COACH ?

-(https://tcc.apprendre-la-psychologie.fr/l-alliance-therapeutique.html)

 

Nous contacter

Leadership en Afrique : Le coaching des dirigeants pour booster l'engagement des collaborateursSandrine Saliba est Coach Exécutif Sénior certifiée Master Coach Certified  (MCC) par la Fédération Internationale de Coaching (ICF). Elle est également formatrice au métier de Coach (RNCP et niv 2), Mentor de coach pour les accréditations ICF et Superviseur de coach ESQA

 

 

 

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