supervision de coach professionnel, supervision individuelle, coach

Nous sommes ravis de lancer notre série « Voyage au sein d’une séance de supervision de coach professionnel : cas réels inspirants ».

Vous y découvrirez toutes les coulisses d’une séance de supervision individuelle entre un superviseur de coach et un coach professionnel certifié . Exemple de demande de supervision, de méthodologie utilisée et partage d’une partie des échanges sont retranscris ici pour vous aider à mieux comprendre les sujets que l’on traite et comment se passe concrètement une supervision individuelle de coach.

Cas réel inspirant N°1 d’une séance de supervision de coach professionnel : « blocage et reflet systèmique »

 

  • Contexte dans lequel s’inscrit la demande du coach supervisé

Véronique est coach professionnelle , elle accompagne une jeune maman débordée entre sa vie de famille et ses activités professionnelles. Sa cliente souhaite notamment pouvoir parvenir à obtenir davantage d’aide de la part de ses enfants et de son mari pour la réalisation des tâches ménagères. Celle-ci se sent seule, dépassée, frustrée et à le sentiment que son entourage ne l’aide pas et ne la soutient pas.

La cliente souhaite que ses séances de coaching l’aident à mieux se faire respecter et à savoir demander de l’aide à ses enfants et à son époux de manière efficace, pour être entendue.

Véronique, la coach professionnelle , a du mal à faire avancer sa cliente et a le sentiment que celle-ci est dit-elle « figée », « rigide », « ne se remet pas en question » et « est dans le déni ». Elle me dit également que selon elle, sa cliente « n’essaie pas de comprendre la situation », « qu’elle a beaucoup de certitudes » et que sa cliente souhaite mettre en place un « système autoritaire pour parvenir à ses fins », qui , la coach en est sûre « ne fonctionnera pas ».

La coach professionnelle supervisée , se voit elle-même bloquée dans une impasse et ne sait plus comment s’y prendre pour aider sa cliente à progresser. Elle se dit agacée par sa cliente qui, au moment de prendre conscience et d’avancer sur des actions possibles, semble se « refermer». Au moment de notre séance de supervision , seule une séance entre la cliente et Véronique a été effectuée.

  • Demande du coach supervisé pour sa séance de supervision

Véronique la coach professionnelle formule sa demande de supervision ; elle souhaite repartir de sa séance avec des pistes pour sortir de cette impasse.

  • Méthodes utilisées lors de la séance de supervision de coach professionnel

Comme pour toutes les séances de supervision individuelle de coach je m’appuie généralement sur les étapes suivantes :

  • Rappel du cadre et des règles de confidentialité propres à notre espace de supervision
  • Temps dédié au coach supervisé pour expliciter la situation, ses difficultés et le contexte dans lequel s’inscrit la problématique.
  • Spécification de la demande de supervision pour la séance en une phrase simple et claire
  • Validation éventuelle de la fonction de supervision attendue
  • Ouverture de la discussion avec les hypothèses du coach supervisé
  • Regard croisé avec les hypothèses du superviseur
  • Point d’avancement sur la demande de supervision pour la séance et synthèse des différentes pistes retenues par le coach supervisé
  • Déclusion et validation du ressenti émotionnel du coach supervisé

Dans cette séance, je valide en particulier le besoin de la coach supervisée Véronique, quant à la fonction de la supervision qu’elle sollicite aujourd’hui.

Parmi les quatre fonctions de la supervision , Véronique exprime le besoin de solliciter deux fonctions. D’une part la fonction résolution de cas car elle ne sait vraiment pas comment avancer sur cette problématique mais aussi la fonction soutien de la supervision. En effet, Véronique se sent coupable et a peur d’avoir mal fait, voire d’avoir perdu sa cliente.

  • Hypothèses partagées entre le coach supervisé et le superviseur

La coach supervisée émet une première hypothèse sur ses valeurs qui auraient été touchées en tant que mère elle-même. Elle a notamment été choquée par les propositions de sa cliente qui affirme « ne pas aimer jouer le soir avec ses enfants car elle trouve les jeux stupides ». Elle trouve que son instinct maternel est peu présent et se dit troublée. Elle ressent un écho au propre amour sans limite qu’elle porte à ses propres enfants.

Elle fait une seconde hypothèse en s’appuyant sur les principes de l’Analyse Transactionnelle et considère que son parent normatif est peut-être ici trop fort. Son habitude de se positionner elle-même en tant que parent normatif dans sa vie, pourrait inconsciemment la conduire à reproduire cela avec sa cliente et à vouloir la faire adhérer à son propre système de normes, et à ce qui lui semble être l’attitude « d’une bonne mère ».

Je partage avec la coach supervisée une troisième hypothèse qui est celle du lien de confiance et de sécurité (compétence 4 selon ICF ). Je questionne Véronique sur sa manière de l’avoir construit avec sa cliente. La coach me dit immédiatement que “le sujet n’est pas là”, qu’elle sait très bien créer ce lien de confiance et qu’elle ne souhaite pas approfondir cette hypothèse.  Je la sens sur la défensive et bloquée au moment où elle exprime cela. Elle me donne l’impression de balayer avec un certain agacement ce sujet.

Je décide de lui partager ce que je vis sur l’instant dans ma relation avec elle, qui j’en fait l’hypothèse, pourrait être un reflet systémique.

Je lui partage mon observation sur le sentiment que je ressens dans sa manière de balayer d’un revers de main l’hypothèse du lien de confiance et de se fermer à cette éventualité. Je lui demande si ce que je vis et exprime, ressemble à ce qu’elle ressent elle-même avec sa cliente ? J’ajoute que, je m’interroge sur une possible similitude e entre sa manière de fonctionner avec moi et la manière de fonctionner de sa cliente avec elle. Autrement dit, je me demande si ce qui se joue dans le système « coach-client », n’est pas en train de se rejouer dans notre système « coach supervisé-superviseur ».

Interloquée, la coach referme de nouveau l’hypothèse de manière définitive et affirme qu’au contraire elle est très ouverte à toutes possibilités.

En conscience d’une probable validation de mon hypothèse devant ce comportement, je décide de ne pas insister pour ne pas reproduire le schéma suivant à l’infini ; «quelqu’un donne son idée, l’interlocuteur se ferme car il n’est pas d’accord, ce qui agace le premier protagoniste, qui se ferme à son tour…». Je décide au contraire de travailler le lien de confiance et de sécurité avec la coach supervisée pour favoriser son ouverture et sa capacité à sortir progressivement de cette impasse systémique, où, coach supervisée et cliente se sont probablement enfermées.

Je choisis alors de travailler sur la fonction soutien sollicitée en début de supervision par la coach supervisée. J’espère qu’en apportant moins de culpabilité à ma cliente elle pourra s’ouvrir pour mieux avancer. J’espère aussi que cela nous aidera à renforcer notre propre lien de confiance entre elle et moi.

Pour cela je lui partage une expérience personnelle avec un client difficile qui m’a aussi donné l’impression de me sentir piégée, figée, dans une impasse. Je partage avec elle que cette sensation arrive à chacun de nous, coach professionnel . Je partage ma part de vulnérabilité pour donner à Véronique l’autorisation d’être elle-même vulnérable plutôt que coupable. Et je décide de ne rien ajouter, de seulement adoucir la résistance et le ressenti de culpabilité.

 

J’espère que ce qui s’est passé aujourd’hui dans notre système entre la supervisée et moi-même pourra se dupliquer à l’échelle du système client. Autrement dit, qu’il y aura un reflet systémique descendant où ce qui se passe dans la relation entre le superviseur et le coach, est importé dans la relation entre le client et le coach. J’ai l’espoir qu’implicitement la coach supervisée ouvre son propre système de défense et porte son attention à retisser les liens pour que sa cliente s’ouvre à son tour.

 

Options retenues par le coach supervisé

En conclusion, j’invite le coach à préciser si elle a suffisamment d’éléments pour répondre à sa demande et quelles sont les différentes hypothèses de notre conversation qu’elle souhaite conserver.

Elle propose de retravailler sur son système de valeurs de façon à faire preuve de plus de souplesse pour accueillir les valeurs de l’autre, sans être dans le jugement.

Elle a également envie de garder l’idée de l’Analyse Transactionnelle et de se remettre dans une position plus adulte qui permettra une totale responsabilisation de sa cliente. Elle propose par exemple de la questionner davantage en cas de doute sur l’efficacité de son plan d’action, plutôt que de préjuger qu’il ne marchera pas en s’énervant intérieurement.

 

Elle suggère aussi de prendre le temps de retravailler le lien de confiance et de sécurité avec sa cliente, et d’accepter de prendre son temps, sans vouloir « pousser la cliente » à l’action et à la prise de conscience.

Progressivement je sens que cette séance l’a fait réfléchir et que notre conversation va faire son chemin sur sa capacité à s’ouvrir et non à se fermer devant la propre attitude « fermée » de sa cliente, comme elle le reproche à celle-ci .

Pour conclure, je lui demande si son objectif de séance de supervision a été atteint et l’invite à me faire part de son état émotionnel.

Elle me dit avoir un peu relâché la pression qu’elle se mettait sur la qualité de ce coaching et sur sa forte culpabilité de ne pas avoir été « à la hauteur » de ses espérances.